On voit de drôles de choses dans un train mais là, c’est trop pour moi ! Plongé dans mon journal, je n’avais pas fait attention aux deux personnes qui s’installaient en face de moi. Juste sans avoir l’air de rien rapprocher mes pieds pour bien occuper tout l’espace auquel j’ai droit. Ne rien lâcher mais rester absent pour éviter toute contestation. Le plus malotru des humains hésitera toujours à empiéter sur le territoire d’un homme si important qu’il ne peut pas distraire un coup d’œil de l’étude de son journal, un journal de référence, pas une quelconque gazette futile. Tout s’est bien passé, tout c’est passé comme j’ai l’habitude.
Jusqu’à ce qu’il parle. Et mon Dieu, cette voix ! Je me suis senti transpercé par elle comme un bigorneau par l’aiguille qui va le chercher au fond de s coquille pour le porter à des lèvres gourmandes. Comme le bigorneau je me suis senti cuit. Alain, mon ami de trente ans, sa manière de parler si reconnaissable, sa voix curieusement ensoleillée et trainante. J’ai revécu en un instant tout ce qu’il m’avait infligé. La manière dont il avait séduit Clara, la lumière de ma vie. Mais c’est plus insupportable encore. Je l’entends qui roucoule, qui parle à mots couverts, pas si couverts que cela, de choses qu’on ne raconte pas en public. Je vais hurler. Il ne faut pas. Il faut que je réfrène le tremblement du journal, de mes mains. Je ne peux pas me dévoiler, pas devant Clara. C’est trop humiliant ! Je de viens fou. Clara, je t’en supplie fais le taire ! Clara, toi si délicate ! Clara ! Oh Clara !
Mais cette voix, cette voix qui minaude à son tour, ce n’est pas la tienne ! Clara ! Oh Clara !
jeudi 2 février 2012
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