La
correction
- Tu rentres tard ce soir, chéri ?
- Peut-être. Je joue au tennis avec ce gros con prétentieux de Pierre N.1. Tu sais le nouveau collègue dont je t’ai parlé au dîner hier soir. Celui qui n’arrête pas de dire « moi, je … moi, je ». J’ai bien l’intention de le mettre minable au tennis ce gros vantard. Une correction, une bonne fessée à son amour propre, c’est ça qu’il va avoir le monsieur « je fais tout mieux que tout le monde ».
- Mais fais attention de ne pas t’énerver mon chéri, tu risques de perdre tes moyens.
- Tu as raison, ma chérie. Je vais me concentrer comme une bête et je vais le laminer. Il ne s'en remettra pas. Je t’adore et je file, je vais finir par me mettre en retard.
Le
temps est magnifique , une de ces journées de printemps où la
nature semble exulter de toutes les forces de vie qui bouillonnent en
elle. L'air est léger et pas un souffle de vent ne perturbe le jeu.
Ils sont face à face, terriblement concentrés. Cela fait trois
quarts d'heure qu'ils jouent et se battent sur chaque balle. S'il y
avait un spectateur à cet affrontement féroce il se demanderait la
raison d'une telle hargne. Mais eux ne se posent pas la question. Ils
sont entrés insensiblement dans cet état d'esprit où leur vie se
résume à ce qui se passe entre les grillages rouillés d'un terrain
de tennis de banlieue. Ils jouent le dernier set, celui qui doit les
départager.
Mais
voilà que la victoire a choisi son camp. L'un des joueurs perd pied.
Il rate service sur service. Il a beau se battre sur toutes les
balles de son adversaire cela lui est fatal. Il a perdu le match.
Pierre
N.2
s'approche du filet en trottinant. Il arbore un large sourire de
satisfaction et dit à son adversaire en lui serrant la main :
-
Tu joues tellement mal que tu m'as complètement déréglé mon
service.
1
Pour préserver l’anonymat des protagonistes de ce drame les noms
ont été changé.
2
Idem note supra.
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