samedi 7 février 2015

Ligne une XIII

Tout est inhabituel: la direction dans laquelle il va, aujourd'hui c'est vers l'est au lieu de l'ouest, le jour et l'heure, un samedi matin à sept heures et demi, généralement le samedi il n'ouvre pas les yeux avant huit heures. Il a mis son réveil trop tôt, il va arriver au lieu du rendez-vous en avance et trouver porte close. Quelle idée il a eue?

Il fait froid et humide dehors. Il décide de rester un quart d'heure au chaud dans la station pour s'éviter une attente à battre la semelle sur un trottoir. Il a le supplément Livres du Monde à finir. Cela tombe bien.

Les fauteuils de la station ont un peu une forme de coquetiers. Ils sont sensés dissuader les personnes sans domicile fixe de s'y installer. Et zut pour les esprits pervers qui ont transformé des sièges en instruments de torture!  Pour l'instant ce sont ses fesses qui sont inconfortablement resserrées. 

Il replie son journal. C'est l'heure de repartir. En se levant il est surpris par le spectacle de deux pieds nus, orteils en éventail. Un homme qu'il n'avait pas remarqué, trop absorbé par sa lecture est couché entre deux rangées de sièges au milieu de tout un barda. Il a étalé des vêtements qui ont l'air d'avoir séché toute la nuit sur plusieurs des inconfortables fauteuils coquetiers. 

Joli pied de nez à ceux qui veulent interdire le mobilier urbain aux gens de la rue!

Au retour de son rendez-vous il sort de sa station habituelle. Une jeune femme assise par terre dans le couloir du métro lui demande de l'argent. Il passe sans paraître la voir ni l'entendre et puis, sans qu'il sache pourquoi, se ravise et lui fait un beau sourire, un sourire qui le surprend lui-même. La jeune femme lui souhaite alors le bonjour.