mercredi 29 septembre 2010

Les espadrilles

Elle était si belle notre histoire d’amour ! Presque incroyable. Ces longues journées et ces courtes nuits d’été passées dans cette cabane délavée par les intempéries, nous deux seuls au monde en haut de la falaise.

La profondeur de tes yeux couleurs d’océan, l’orient de ta peau, l’ardoise sur laquelle nous échangions nos pensées.

Moi, muré dans le silence de la surdité. Toi, prisonnière de la splendeur de ta propre voix si envoutante qu’elle empêchait les hommes de t’aimer pour ce que tu aurais tellement aimé être : une femme ordinaire, la femme ordinaire d’un homme ordinaire.

Pourquoi es-tu partie cette nuit dans mon sommeil sans même inscrire un adieu sur notre ardoise ?

Je veux laisser intacts sur notre ardoise les derniers mots que tu m’as écrits : bonne nuit. Alors c’est sur une page arrachée à mon carnet de croquis que je t’adresse ce message, bouteille à la mer : reviens, je t’aime !

Ton Arthur

PS : Bon sang, pourquoi m’as-tu piqué mes espadrilles ? Où les as-tu mises ? Je vais avoir les pieds en sang à déposer ma bouteille par le chemin qui descend de la falaise. Comme si une sirène avait besoin d’espadrilles !

dimanche 19 septembre 2010

Dialogue de sourds

- ...
- (Il y a quelque chose qui me gêne. Ça m'énerve. Je ne retrouve pas quoi au juste)
- Vous comprenez si vous me supprimez mes heures supplémentaires ...
- (C'est trop rageant. C'est comme si je l'avais au bout de la langue)
- Je comptais sur elles. Vous comprenez ...
- (Il faut dire qu'il ne m'aide pas beaucoup celui-là à tout le temps répéter la même chose)
- Avec la gosse ma femme a arrêté de travailler. Vous comprenez ...
- (Je comprends surtout qu'il y a quelque chose qui m'échappe)
- A son âge on ne pensait plus avoir d'enfant ...
- (A mon âge ce n'est tout de même pas Alzheimer)
- Je ne vous dit pas tout ce qu'on avait tenté pour avoir un enfant ...
- (Surtout ne le dites pas! Ce que ça peut être énervant de chercher quelque chose dans sa tête comme ça!)
- Pendant des années. Et puis on avait fini par ne plus y croire ...
- (Moi non plus je finis par ne plus y croire. Mais bon sang, à quoi je suis sensé penser!)
- On avait acheté une petite maison. On travaillait tous les deux.
- (Peut-être qu'en arrêtant de chercher ça va revenir)
- On avait tout calculé pour les remboursements.
- (Mon pauvre ami. Au moins tu sais ce qui ne va pas pour toi)
- Alors si en plus je perds mes heures supplémentaire ...
- (Et moi je perds ce que j'avais à faire. Tais-toi une minute, bon sang, que je puisse réfléchir!)
- On va être obligé de vendre la maison.
- (Toi, mon bonhomme tu sais que tu m'ennuies avec ton histoire)
- Vous voyez, sans ces heures supplémentaires on ne peut pas s'en sortir.
- (Mais tais-toi donc! Je te dis que j'ai quelque chose qui me trotte dans la tête ...)
- Vraiment je compte sur vous.
- Je vais voir si je peux faire quelque chose mais je ne vous promets rien. (C'est tout vu, c'est non! Maintenant ouste!)
- Merci monsieur le directeur.
- Au revoir.
- Au revoir monsieur le directeur. Merci
- (J'ai trouvé! mon petit doigt. Le coupe-ongle. Il est là) Clic-clic. (C'est mieux comme ça. Quel raseur ce type!)

mercredi 1 septembre 2010

Retard

Si je ne rentrais pas dans ma robe de mariée ?

Plus que quinze jours, et cette tarte au citron meringué que je viens de manger … Toutes ces tartes au citron meringué que j’ai mangées depuis deux mois que la robe est finie.

Voyons … une fois par jour pendant deux mois … voyons … ça fait … non ! Mais c’est énorme … je dois me tromper, c’est trop !

Il faut que j’enlève les samedis et les dimanches. Comme je travaille pas je passe pas devant la boulangerie aux tartes au citron meringué.

Oui mais, à côté de ça les samedis j’ai mes leçons de conduite. Alors pour me déstresser je prends un éclair au chocolat chez le boulanger à côté de l’auto-école avant la leçon … et un éclair au chocolat pour me remonter le moral après la séance … il faut dire que la conduite … moi … enfin !

Et puis le dimanche maman fait de la tarte aux fraises. Vraiment elle exagère, maman, avec ses fraises congelées. Pas de saison, pas de répit.

Tout ça d’ailleurs c’est la faute de maman. Quelle idée d’avoir fait faire une robe fourreau avec un bustier si étroit que je peux presque pas respirer ? Pour mes seins au moins c’est pas les tartes au citron meringué qui les feront grossir.

… les tartes, non … mais j’aurais jamais dû dire oui à Marcel. Il paraît que l’effet sur les roploplos est presque immédiat … et ça va faire dix jours de retard !