mercredi 29 août 2007

Maèva

J’aime la sensualité féminine de la voix de mon GPS qui me guide avec assurance. L’autre présence féminine dans ma voiture dort à poings fermés. Et à bouche largement ouverte, car elle ronfle horriblement fort. Comment une créature si pleine de charme lorsqu’elle est éveillée peut produire un tel bruit de moulin à café une fois endormie ? Voilà un mystère de l’univers dont mon père, brillant professeur de cosmologie, spécialiste d’une certaine gamme de rayons X mise en évidence par lui dans certaines étoiles de la constellation d’Orion, ce qui pourrait lui valoir un jour le prix Nobel, ne m’a pas parlé. A sa décharge si Maèva a un prénom d’étoile ce n’est pas le genre de personne que mon père a pu rencontrer dans sa carrière universitaire. Pour ce qui est sa carrière sentimentale , elle s’est tenu encore plus éloignée, si cela était possible, du genre de bipèdes auquel appartient Maèva, mon père vouant depuis l’age de vingt deux ans une adoration exclusive à ma mère, administratrice du CNRS aux tailleurs stricts.

Moi, leur fils unique, je n’ai pas à m’en plaindre, même si j’ai suivi d’autres chemins. Je crois, sans me vanter, que j’ai exploré plus de filles que mon père n’a connu d’étoiles. N’ayant pas l’esprit très scientifique je n’en ai pas fait le compte mais je suis certain qu’avec ses lèvres pulpeuses et son corps agréablement dodu Maèva restera dans mes tablettes comme un morceau de choix. Nous nous sommes rencontré il y a un mois dans une boite des Baléares. Nous avons fait tout ce qu’il convient de faire dans ces cas-là puis la demoiselle a demandé que je la raccompagne dans sa case au bord de la plage. Rapport au ronflement, j’imagine. Ça m’allait bien. Notre intermède avait été assez chaud et intense mais il y avait tellement d’occasions à saisir en ce lieu que je préférais laisser ma chambre libre pour d’autres rencontres.

Le lendemain nous nous retrouvions, un peu par hasard, à la plage, et là j’ai flashé pour ses ongles de pieds au vernis abricot assortis à la couleur de ses tongs. Il n’en faut pas plus pour embraser la savane. Maèva devait repartir le soir même. Comme elle habitait également Paris, elle s’est mise à peupler mon agenda de retour de vacances. Nos rencontres ont continué d’avoir l’intensité et la brièveté de notre première nuit à Ibiza.

Rien à dire de plus si mon patron, propriétaire de la boite dont je suis le numéro deux, ne m’avait pas invité il y a quinze jours à venir passer le week-end dans sa maison de Normandie avec mon épouse. Je ne lui ai pas dit, à cet affreux paternaliste catho-réactionnaire dont mon sort dépend, que je n’étais pas marié. Je n’ai pas osé. Et du coup j’ai embarqué Maèva dans cette aventure.

Elle est cool Maèva, elle ne m’a pas posé de question. Elle n’a même pas demandé où on allait passer le week-end. C’est vrai qu’elle ne m’a pas prévenu non plus pour les ronflements. Mais peut-être qu’elle ne ronfle que dans la voiture. En tout cas elle s’est habillée classique. Ça lui va plutôt bien. C’est elle-même qui m’a proposé de remplacer le nom un peu exotique de Maèva par celui plus conventionnel d’Odile. Gérard et Odile. Un beau couple.

Dès qu’elle a déposé son sac de voyage dans le coffre de ma voiture elle s’est endormie sans demander son reste. Maintenant je me suis garé au pied du perron de la somptueuse demeure de mon boss qui descend les escaliers pour m’accueillir. Je secoue Maèva pour la réveiller. Elle semble affolée.

- Gérard, c’est mon père !
- …
- Odile !

2 commentaires:

Anonyme a dit…

bien écrit, bien mené!!! un plaisir à lire

Anonyme a dit…

bien écrit, bien mené!!! un plaisir à lire